Parolier-compositeur-interprète: l'indissociable trio

Publié le 22 mai 2017 à 19:07

Quand vous écrivez des paroles, gardez toujours en tête que la finalité de votre travail, c’est une chanson. Votre texte sera peut-être lu parfois comme un poème, mais la plupart du temps, vos mots n’existeront qu’associés à une musique et à l’interprétation d’un chanteur.

Ça change quoi? Ça change beaucoup de choses! Écrire des paroles de chanson ne peut pas uniquement se résumer au simple fait d’écrire des paroles dans son coin. Si certains paroliers peuvent très bien décider qu’une fois leur texte fini, personne ne pourra changer la moindre virgule, dans la réalité du travail, il faut faire preuve d’un minimum de souplesse et d’esprit d’équipe. Une chanson, ce sont des paroles, mais aussi une musique et une interprétation.


Travailler avec le compositeur

Si vous travaillez avec un compositeur, deux cas de figure se présentent généralement. Soit il vous fournira une musique que vous devrez « habiller » de vos mots, soit c’est vous qui écrirez en premier le texte et lui qui le mettra par la suite en musique.


Cas #1: le texte est écrit en premier

Si vous écrivez les paroles en premier, vous aurez généralement une grande liberté d’écriture. Vous pourrez choisir le nombre de pieds qui composent vos vers, écrire autant de couplets, de ponts et de variations de refrains qu’il vous plaira, en gros, structurer le texte à votre guise. C’est l’avantage d’être le premier dans la « boucle créative »!


Cela dit, cette liberté doit être nuancée par un facteur de taille: vous n’écrivez pas de la poésie, mais les paroles d’une chanson! Votre travail est donc étroitement lié à celui du compositeur qui va prendre le relai et travailler à partir de vos paroles. Autant vous dire que si votre piétage (le nombre de syllabes par vers) est totalement irrégulier d’une ligne à l’autre, il lui sera difficile, voire impossible, d’inventer un motif mélodique cohérent.


Même chose si vous vous faites bavard à outrance. Si vous avez écrit 12 couplets, 6 ponts et trois refrains, il pourra certes mettre votre texte en musique, mais est-ce qu’une chanson de 12 minutes a des chances de passer à la radio ou de se retrouver sur un disque? Pas certain. Mais si vous écrivez hors de toutes contraintes professionnelles, dans ce cas, lâchez-vous et écrivez autant de couplets que vous voulez, il n'y a pas de « règles » en soi.


La plupart des textes de chansons sont basés sur le principe des rimes. Ce n’est pas une obligation et l’on peut très bien écrire des paroles sans rimes, mais cela reste plutôt rare. Avant d’envoyer votre texte au compositeur, vérifiez bien que « vous rimez » comme il faut.


Cas #2: le texte est écrit après la musique

Si vous devez écrire les paroles d’une chanson à partir d’une musique existante, vous aurez la plupart du temps la contrainte imposée par la ligne mélodique. Le compositeur vous fournira en effet une maquette de chanson plus ou moins élaborée qui contiendra une harmonie et une mélodie. C’est à partir de cette mélodie que vous allez pouvoir travailler.


Souvent, il chantera, en attendant que vous trouviez les mots, ce qu’on appelle dans le milieu du « yahourt », c’est-à-dire une suite d’onomatopées ou de mots inventés qui sont chantés pour permettre au parolier de faire entendre sa ligne mélodique. Ça sera des « pam pam pam paaaaaam » pour l’un, du yahourt en faux-Anglais pour l'autre et certains compositeurs choisissent de ne pas chanter, mais de faire jouer la ligne mélodique par un instrument.

À vrai dire, peu importe la méthode choisie, ce qui compte c’est que vous puissiez identifier clairement les différentes mélodies, celles des couplets, celle du refrain et des éventuels ponts. Vous pourrez ainsi déterminer le piétage de la chanson. Vous obtiendrez après avoir décodé la musique ce genre de structure:


COUPLET 1

Vers 1 : octosyllabe (8 pieds)
Vers 2 : octosyllabe (8 pieds)
Vers 3 : hexasyllabe (6 pieds)
Vers 4 : hexasyllabe (6 pieds)

COUPLET 2
Vers 1 : octosyllabe (8 pieds)
Vers 2 : hexasyllabe (6 pieds)
Vers 3 : octosyllabe (8 pieds)
Vers 4 : hexasyllabe (6 pieds)


REFRAIN

Vers 1 : tétrasyllabe (4 pieds)
Vers 2 : pentasyllabe (5 pieds)
Vers 3 : pentasyllabe (5 pieds)
Vers 4 : tétrasyllabe (4 pieds)

 

Une fois que ce travaille de repérage des pieds est fait, il ne « reste plus » qu’à trouver les mots!

Cas #3: le texte et la musique sont écrits en même temps
Si vous êtes à la fois l’auteur et le compositeur d’une chanson, il se peut que vous écriviez la musique et les paroles en même temps, au fur et à mesure. Les règles de versification et de piétage qu’on vient de voir s’appliquent aussi, mais si vous avez un problème de rimes ou de nombre de pieds, vous aurez un accès très direct au compositeur pour lui savoir ce qu'il faut modifier!  

Travailler avec l’interprète

Il arrive qu’en tant que parolier, vous ayez à travailler directement avec l’interprète. C’est l’idéal dans la mesure où c’est lui qui va incarner la chanson, la défendre et parfois la mettre à son répertoire de tournée pour plusieurs décennies! C’est donc une bonne chose qu’il puisse voir avec vous les ajustements qui peuvent être faits. Voici les cas où il pourra vous demander de retravailler le texte:

  • Quand un mot ou une suite de mots est très difficile à chanter (Les chaussettes de l’archiduchesse sont-elles sèches? / Seize chaises sèchent)
  • Quand il veut changer une sonorité/rimes sur une note tenue. Certaines sonorités comme le son « a » permettent en effet au chanteur de chanter à pleine puissance. Il arrive que pour faciliter l'interprétation, un chanteur vous demande de faire des ajustement dans ce sens.
  • Quand « Il ne le sent pas ». On est ici dans le domaine du ressenti. Certains interprètes quand il se mettent votre texte en bouche, vous être plus ou moins confortable avec l'interprétation, et parfois, il y a certains passages qu'ils ne sentiront pas, qui ne sonneront pas pour eux.
  • Quand il n’assume pas un mot ou une phrase. Mot trop précieux, trop vulgaire, trop technique… certains interprètes veulent assumer chaque mot et sont donc très exigeants sur les paroles.
  • Quand il pense que vous pourriez mieux faire. Quand vous travaillez avec un artistes et lui proposez des paroles, il va vous donner son avis. S’il aime votre travail, il va retenir la chanson, mais pourra néanmoins apporter quelques bémols, vous demander de retravailler un couplet, raccourcir le refrain, trouver un pont etc. Il faut alors trouver un compris qui satisfasse l’interprète, mais qui ne vous frustre pas et ne mette pas à mal l’intégrité de votre travail. Si on vous demande de modifier 80% de votre texte, c’est peut-être qu’il ne convient pas à l’artiste. Vous avez le droit de le reprendre, vous n’êtes pas obligé de vous soumettre et de tout changer. Défendez votre point de vue, vos choix, vous êtes l’auteur après tout!

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